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Un cabinet de curiosités du XXIe siècle

« Bibliothèques, citoyenneté, société : une confluence vers la connaissance »
C’est le thème du congrès de l’IFLA, l’organisation internationale des bibliothèques, qui se tient cette année à Lyon, après Singapour en 2013.

A la veille de la fin du congrès, je pense que peu de gens ont compris le jeu de mot (très local), dont un indice se trouve dans le logo de l’événement. Il y a quinze ans, la municipalité parlait déjà de réhabiliter le quartier situé de l’autre côté de Perrache et baptisé… Confluence (au point de jonction entre le Rhône et la Saône). C’est aussi le nom du musée qui devait prendre place au sein de ce nouveau quartier… et dont l’inauguration ne devrait plus tarder, après huit ans de travaux! A l’origine, la décision avait été prise, entre la poire et le fromage, d’implanter un nouveau musée, sans trop savoir ce qu’on allait y mettre. On parlait alors d’un musée autour des sciences humaines. J’étais curieux de voir à quoi pourrait ressembler un tel musée. Finalement, c’est le museum d’histoire naturelle qui va déménager. Déçuuuu!

Sur les 22000 m², seuls 5000 m² seront réservés aux expositions. Dans un esprit très « troisième lieu« , le bâtiment abritera également selon l’architecte auditoriums, bibliothèques et restaurants, en plus des réserves.


Le musée des confluences en avant-première par france3rhonealpes

J’ai visité plusieurs expositions temporaires dans la Rotonde du Musée Guimet de Lyon (sur les Inuits, sur la Lune…), dont la muséographie m’avait séduit. Ces expositions, itinérantes, avaient été conçues au Québec (les meilleurs en muséographie). En revanche, les collections permanentes des musées d’histoire naturelle ne sont pas mes préférées : généralement agrégat d’animaux taxidermisés ou dans le formol et de tout un bric à brac dont la seule cohérence est d’avoir été réuni par un érudit local, il est difficile d’en dégager un message clair qui se traduise dans la scénographie. C’est le problème de l’ensemble des musées d’ethnographie. Le seul musée de ce type qui m’ait vraiment plu est celui de Neufchâtel en Suisse, avec un message lucide et une pointe d’humour : « comment mettre en valeur un héritage aussi encombrant? »

Vous vous demandez peut être si au-delà du jeu de mot de L’IFLA, il existe un rapport entre musées et bibliothèques. Dans son Que Sais-je sur les Sciences de l’information, Yves-François Le Coadic défini l’association bibliothèques / archives / centres de documentation / musées comme le cœur de son sujet. En effet, dans les quatre cas, il s’agit de documents (livre, plan ancien, notice technique, objet d’art, ethnographique ou technique, etc) dont l’accès est ouvert à un public, et dont on doit être capable de retrouver rapidement la localisation et l’historique, grâce à des documents secondaires (notice bibliographique, record management, dossier d’œuvre…), en vue d’en assurer la médiation. Les problématiques de conservation et de restauration concernent également un partie de chacune des quatre professions.

Ainsi la revue de L’ADBS (l’association des professionnels de l’information et de la documentation), « Documentation Sciences de l’information », consacre dans son numéro de juin 2014 un dossier intitulé « Document et musée : du discours sur l’œuvre à la médiation culturelle » :

Pousser les portes des musées, connaître leur fonctionnement, découvrir et observer la production documentaire réalisée au quotidien fait partie du privilège des professionnels de l’institution ou de celui de quelques chercheurs ayant la possibilité d’y entrer. Or, les modes de production, de circulation et de consultation du document, souvent méconnus, représentent un regard différent sur un objet ou une œuvre d’art du discours tenu au grand public. Ce dossier propose, par ses contributions, une mise en exergue des pratiques professionnelles autour du document exercées par les acteurs des institutions muséales et tente de démontrer en quoi la production documentaire peut être considérée comme pivot entre l’organisation interne du musée et sa mission de médiation.

adbsDocSI-Musee
Documentation Sciences de l’information – Volume 51, N° 2, juin 2014

D’autre part, j’ai longtemps été abonné à La Lettre de l’OCIM (Office de Coopération et d’Information Muséales). Or la couverture du dernier numéro, pourrait tout aussi bien concerner les bibliothèques :

  • Observer les publics

    Après avoir rappelé la méthodologie mise en place par l’Observatoire permanent des publics pour interroger in situ les visiteurs des institutions muséales, les auteurs montrent comment ce protocole, appliqué depuis 1994 à l’Espace des sciences, a permis d’appréhender sur la longue durée les pratiques de visites et en particulier, de mesurer les évolutions du profil sociodémographique et culturel des visiteurs ainsi que leur niveau de satisfaction.

  • Les applications numériques : quelles propositions de médiation ?

    En s’appuyant sur un large corpus d’applications mobiles de musées, d’expositions et de sites patrimoniaux accessibles aux visiteurs sur leurs tablettes et smartphones, les auteurs présentent les tendances qui caractérisent ce type d’outil de médiation en pleine expansion, et rendent compte des formes de médiation qu’il propose.

La lettre de l’OCIM – n°154, Juil – Août 2014

Pourtant, quand on demande ses goûts littéraires plutôt qu’en matière de musique, de cinéma, de BD ou d’essais à un futur bibliothécaire qui sera amené à accueillir tous les publics, est-ce qu’on ne se trompe pas de métier?

Il y a vraiment un fossé sur la vision de ce qu’est un document entre les bibliothécaires et les documentalistes. Je ne doute pas qu’il en soit de même chez les archivistes et les professionnels des musées. Il n’y a hélas que le documentaliste à croire sincèrement que les quatre font le même métier. Par exemple, combien de bibliothécaires savent que les musées aussi font des récolements? Le regroupement des quatre (InfoDocBib+Mus), intéressant sur le papier, n’est-il pas en réalité aussi hétéroclite qu’un cabinet de curiosité du XVIIIe siècle? Qu’en pensez-vous?

<MAJ du 25 août 2014 : Un inventaire à la Prévert>

Si aux quatre métiers cités dans le billet ci-dessus, correspondaient quatre associations nationales, les choses seraient encore simples. Mais les musicos et ceux qui font la promotion du numérique cherchent à se singulariser, les directeurs de bibliothèques départementales estiment ne pas faire le même métier que les directeurs de bibliothèques de grandes villes… Les professeurs documentalistes, les territoriaux, leurs collègues des université et ceux du privé s’ignorent gentiment les uns les autres… Ajoutons les niveaux européens (EBLIDA) et mondiaux (IFLA, ICA, ICOM). Résultat, quand un intérêt commun, tel que la négociation internationale des exceptions au droit d’auteur à l’OMPI, réuni tous les professionnels de l’information, cela fait du monde autour des petits fours :

Une déclaration a été signée par les présidentes et présidents réunis sur place :
Sinikka Sikilä (présidente actuelle de l’IFLA) et Donna Scheeder (présidente élue)
Xavier Galaup (IABD)
Anne Verneuil (ABF)
Sophie Cornière (ACIM)
Juliette Lenoir (ADBGV)
Anne-Marie Libman (ADBS)
Christophe Pérales (ADBU)
Pascal Sanz (CFI-bd)
ainsi que par Martine Ernoult pour la FADBEN et Thierry Clavel pour la FULBI

Cette déclaration avait été approuvée à distance par les présidents de l’AAF, l’ADDNB, l’ADRA Interdoc et Réseau Carel ;

Petit quizz : avant de demander à Google, êtes-vous capables d’expliciter chacun des sigles ci-dessus, ou au moins d’avoir une vague idée du secteur concerné?

Personnellement, alors que je suis un professionnel, il m’en manquait quatre (CFI, FULBI, ADDNB, ADRA). Comment s’étonner alors de notre manque de visibilité pour le grand public? On s’est offusqué de l’absence de ministres au congrès de l’IFLA, mais comment pouvaient-ils deviner, ou leurs conseillers, que l’IFLA c’est plus important que l’ADBU ou l’ADDNB?

</maj>

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